"Je joue des couleurs

en leur donnant forme."

 

Bannière créée pour accrochage en plein air: fond clair, formes en bleu, gris, vert, jaune, noir
Ma liberté d'artiste. 2013. Acryl sur toile. 235 x 115 cm.

Comment j'en suis arrivée à créer de l'art abstrait

Au terme de ma formation aux Beaux-Arts de Tokyo, je me suis progressivement, et tout naturellement, détournée de la figuration. A mon arrivée en France, avec la découverte de ses paysages, de ses villes et musées, ma palette s'est éclaircie. Les nouvelles couleurs et lumières m'ont enchantée. Sans ambages, j'ai adopté la non-figuration.

 

Je me souviens de l'un de mes premiers tableaux abstraits réalisés en France. Intitulé "Rêve de Suède", je l'avais présenté à un concours. Le jury, présidé par Bernard Dorival, le conservateur en chef du Musée National d'Art Moderne (c'était donc du sérieux!), lui a décerné le Premier Prix. L'année suivante, en 1967, soumission d'un nouveau tableau. Rebelote: Premier Prix. 

Etait-ce une sorte d'approbation de la voie que j'avais entamée? En tout cas, je ne l'ai plus quittée depuis. 

 

Sur mes toiles, je fais résonner des accords et des tensions entre les couleurs, entre les formes, entre le net et le flou, le transparent et l'opaque, le plein et le vide. Je voudrais bien que celui qui regarde le résultat ne remarque pas la complexité de ce travail, et qu'il éprouve simplicité, force et beauté.

 

En composant mes images, en faisant donc parler formes, couleurs, matières, je ne recours pas à des représentations, ni des narrations, ne fais pas de mystères, ni de la décoration. La beauté d'une œuvre rime pour moi avec caractère, équilibre, droiture, limpidité, justesse.

 

La non-figuration m'offre ainsi des possibilités de composition inépuisables. Et la joie de création qui s'en suit.

Ma démarche en bref

En pratiquant de l'art abstrait, je ne le fais pas au sens premier du terme. Je veux dire par là que mon déclic n'est pas une quelconque portion du monde visible (figure, objet, paysage…) dont j'isolerais et "abstrairais" des éléments en vue d'une sublimation, métamorphose, trans-figuration ou autre.

 

Non, mon approche de l'abstraction consiste à mettre directement en jeu des formes et couleurs dans des constellations que l'on ne retrouve pas dans la réalité. Mon ambition est de créer un petit univers fondé sur mon intuition du beau, sur mon expérience, et un peu sur mon état d'âme du moment.

 

Si votre regard posé sur mes images provoquait une surprise, une ouverture de coeur, un questionnement, un instant de détachement par rapport au monde qui nous enveloppe, le ressenti d'une opposition, d'un dépaysement … je ne m'en offusquerais pas. 

 

 

Noriko Tawara répond à la commissaire de son exposition de 2015.

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